Pas de gamay dans le Bourgogne rouge!

Publié le par Patrick Essa

   Les vins bourguignons ne se sont sans doute jamais mieux vendus qu'aujourd'hui. La désastreuse image que la viticulture bordelaise a réussi a donné d'elle même ces dernières années n'y est sans doute pas étrangère car les amateurs de bons vins fuient les prix exhorbitants des meilleurs crus bordelais en même temps que la région elle même qui  a finalement réussi - toute seule - a se discréditer totalement. Elle vit aujourd'hui au niveau de ses petites appellations un marasme sans précédent qui conduit nombre d'exploitations à mettre purement et simplement la clef sous la porte.

  Cela a eu pour effet de doper la vente des appellations génériques bourguignonnes - mais également celles du Rhône - qui sont désormais aussi "chassées" que les crus, surtout si leur rapport qualité-prix est excellent. Il est en effet possible d'acheter des vins des trois côtes bourguignonnes, vinifiés dans des chais performants par d'excellents vignerons pour moins de dix euros.

  De manière concommittente il semble que les images respectives des pinots noirs et chardonnays soient à leur zénith sur le plan commercial et, ce qui est un autre signe évident d'intérêt, le prix de ces terres augmente sensiblement. Ho bien entendu il est encore très éloigné de celui des "villages" et des "crus" mais il devient quasiment impossible d'acheter ces terres tant elles sont courtisées par les producteurs. Elles sont rentables, bien placées la plupart du temps - n'oublions pas que "sous" cette appellation se trouvent encore les "grands ordinaires" - et complantées souvent de ceps anciens qui potentiellement génèrent mesure dans les rendements et qualité.

    Cependant quelques ombres planent sur le lustre nouveau de ces vins "à la mode". En premier lieu de nombreuses exploitations continuent de raisonner à son endroit en le positionnant comme un petit vin de casse-croûte, si modeste qu'il faut le produire en rationnalisant les coûts. Ainsi les rendments autorisés et demandés sont-ils encore trop élevés, les rentrées de récolte très - trop! - mécanisées et les élevages un peu sous dimensionnés.Logique sans doute, compréhensible si l'on veut, prospectif...surement pas!

  Mais il y a plus grave, bien plus grave. On autorise encore certaines parties du Beaujolais plantées en Gamay à revendiquer le titre de Bourgogne rouge. Du gamay dans le pinot! Une supercherie autorisée, indigne de la nature des vins que le marché réclame, indigne de la notion d'origine et de cépage unique qui a toujours été mise en avant par la Bourgogne elle même. PTG excepté!

  Par ailleurs je me demande bien comment les grands opérateurs qui revendiquent Bourgogne "pinot noir" sur les étiquettes s'organisent lorsqu'ils coupent ce cépage avec des provenances beaujolaises. Elles ont le droit de le faire légalement mais alors pourquoi continuer de baptiser ces vins de la mention sésame "pinot noir"?  A hauteur de 15 % de mélange, il me semble, celà est encore permis par les nouvelles lois européennes...mais au delà? Si un lecteur bien informé me lit, qu'il n'hésite pas à intervenir sur cet épineux mais fondamental problème.

  Si la volonté avouée de certains à étendre un jour à l'ensemble du Beaujolais le droit de produire des Bourgogne se confirme, nous risquons de rejoindre le Bordelais dans ses absences de jugement, pour ne pas dire de "jugeotte"! Et nous finirons par tuer la poule aux oeufs d'or au motif de profiter petitement de règles iniques et stupides.

   Gardons nous de commettre une erreur aussi funeste et continuons à valoriser ces vins de belle qualité qui semblent avoir trouver un public fervent et fidèle. Soyons ambitieux pour nos Bourgogne rouges, ayons à l'esprit qu'il nous faut les valoriser en augmentant tant que faire se peut leur qualité et nous les vendrons "mieux et plus longtemps".

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